En 2021, le marché de la complémentaire santé compte 668 organismes habilités répartis selon les trois catégories d’organismes complémentaires : mutuelles, institutions de prévoyance (IP) et entreprises d’assurance.
Ces dernières années, les organismes complémentaires (OC) santé ont fait face à plusieurs bouleversements qui ont affecté leurs performances économiques et techniques :
- en 2020, la pandémie de Covid-19.
- en 2021, la mise en place dans sa totalité de la réforme 100% Santé révisant la couverture santé des postes de soins Optique, Dentaire et Audiologie.
En décembre 2022, la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) a publié un rapport présentant la situation financière des OC santé pour l’exercice 2021. En s’appuyant sur ce rapport, SeaBird analyse les impacts de ces deux événements sur les charges de prestations, les cotisations et les résultats techniques des OC santé.
Impacts sur les charges de prestations des complémentaires santé
Les charges de prestations représentent les prestations versées sur l’exercice ainsi que la variation des provisions techniques (PSAP, IBNR) et participation aux excédents.
Impact global
En 2020, les restrictions sanitaires dues à la pandémie ont réellement affecté la consommation de soins, la limitant aux actes essentiels. De ce fait, la charge de prestations des organismes a diminué de façon non négligeable : -6,6% en comparaison à 2019.
Selon la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2022, la forte contribution de la Sécurité sociale dans ce contexte de crise a abouti à un déficit record de -39,7 milliards d’euros en 2020. Ainsi, en soutien au service publique, une taxe exceptionnelle appliquée aux exercices 2020 et 2021 par la LFSS pour 2021 est mise en place : 1,5 milliard d’euros ont été récoltés sur les OC. L’intégration de cette contribution dans les prestations payées par les OC conduit à une diminution de la charge des prestations de -1,8% en 2020 par rapport à 2019 au lieu de -6,6% dans le cadre d’un scénario sans taxe Covid.
En 2021, les charges de prestations santé sont affectées par un rattrapage de la consommation des soins, notamment en raison des reports d’actes ne pouvant s’effectuer à distance (chirurgie, consultations, achats d’équipements optiques) et par la réforme 100% Santé et son application totale au 1er janvier 2021 (+152% sur les audioprothèses, +39% sur les prothèses dentaires et +16% en optique en 2021).
Sur l’ensemble des OC, la charge de prestations a progressé de +11,6%en 2021. Si l’on prend en compte la taxe Covid en 2020, la progression est de 6,1%.
Impact par typologie d’organisme
Les impacts varient selon le type d’OC du fait de la différence de répartition entre contrats collectifs et individuels.
En 2020, mutuelles et IP enregistrent des baisses comparables de la charge de prestations, respectivement -4,4% et -4,6%. La baisse légèrement plus marquée sur les IP s’explique par le poids des contrats collectifs. En effet, la charge de prestations a baissé de 1,5% en 2020 sur les contrats collectifs (vs +4,4% en 2019) et de 2,1% sur les contrats individuels (vs +0,1% en 2019). Cette diminution plus forte sur les contrats collectifs est liée à la baisse consommation de certains soins, reportés au moment de la crise comme l’achat d’équipement optiques, représentant une part plus importante des prestations en comparaison aux contrats individuels.
De leur côté, les entreprises d’assurance connaissent une augmentation de +4,0% de la charge de prestations. Cette évolution tient à des gains des parts de marché des mutuelles par les entreprises d’assurances (Cf. tableau ci-dessous).
En 2021, le retour à la normale de la consommation et la mise en place du 100% Santé ont un effet comparable chez les différents OC : +5,9% pour les mutuelles et IP, contre +6,1% pour les entreprises d’assurance.
Impacts sur les cotisations des complémentaires santé
Impact global
Sur l’ensemble des OC santé, la masse des cotisations collectées est en diminution de 0,3% en 2020. Cette diminution peut s’expliquer par la baisse du nombre d’emplois et la cessation d’activité dans certains secteurs, comme la restauration ou l’hébergement. Pour ces deux secteurs, selon l’INSEE, l’activité a chuté de 54% entre mars et décembre 2020, en lien avec les confinements.
En 2021, la tendance repart à la hausse, avec une augmentation de 3,1% de la masse totale de cotisations. Cette évolution est liée à la fois à la reprise d’activité des secteurs les plus touchés par la crise sanitaire et à la mise en application définitive du 100% Santé.
Impact par typologie d’organisme
En 2020, le volume de cotisations des mutuelles et IP recule respectivement de -1,6% et -2,7%. La diminution observée sur les mutuelles est due en majorité aux contrats individuels pour lesquels la masse de cotisations décroît de 2,3% en 2020. Du côté des IP, la baisse d’activité lors des périodes de confinement affaiblit l’évolution des cotisations à -3,3% en 2020 sur les contrats collectifs influençant la tendance générale.
Pour les entreprises d’assurance, la masse des cotisations reste en évolution positive (+2,8%), à nouveau grâce à des gains de parts de marché.
En 2021, la reprise des volumes de cotisations des contrats collectifs (+5,8% contre +0,6% sur les contrats individuels) bénéficie particulièrement aux IP, avec une hausse de +7,7%. En effet, le retour d’activité dans les secteurs touchés par la crise et le caractère obligatoire des couvertures complémentaires d’entreprises bénéficient aux contrats collectifs.
Impacts sur le résultat technique des complémentaires santé
Les impacts précédemment observés se répercutent sur le résultat santé des OC ou encore, pour ceux soumis au régime prudentiel Solvabilité II, leur capital en solvabilité requis (SCR).
Impact global
La pandémie de 2020 a eu un effet positif sur le résultat technique santé. Il représentait 1,% des collectées contre 1,2% en 2019. Cette amélioration s’appuie notamment sur un recul plus important de la charge de prestations que des cotisations. Néanmoins, au regard de l’ensemble des OC soumis à Solvabilité II, la couverture en SCR (ie. le ratio fonds propres/SCR) par rapport à 2019. Il est à noter que la volatilité du marché économique au moment de la crise a contribué à l’augmentation du niveau de capital de solvabilité requis.
En 2021, le rattrapage de la consommation de soins et l’implication supplémentaire dans le financement des soins liés à la réforme 100% Santé ont pesé sur le résultat technique des OC, représentant seulement 0,1% des cotisations en 2021. Le marché économique retrouvant plus de stabilité, la couverture en SCR des OC augmente de +3% au global en comparaison à 2020.
Impact par typologie d’organisme
Le résultat technique est plus dégradé sur les contrats collectifs qu’individuels en raison d’une sinistralité plus importante sur ce type de contrats.
L’évolution des résultats techniques santé varie selon le type d’organisme. Les IP, dont la majorité des contrats en portefeuille sont collectifs, ne font aucune marge sur l’activité santé. Néanmoins, une progression constatée sur 2021, malgré le retour à la consommation des assurés.
La dégradation de la couverture en SCR enregistrée en 2020 est essentiellement due aux entreprises d’assurance pour lesquelles l’évolution observée est de -11%, contrairement aux institutions de prévoyance et mutuelles dont les impacts respectifs s’élèvent à -2% et -1%.