Une augmentation rapide des taux et de l’inflation
La reprise de l’inflation et l’augmentation rapide des taux d’intérêts font peser sur les assureurs français un risque de liquidité et de décollecte sur les fonds euros, supports sécurisés des produits d’assurance vie, qui peinent à rester commercialement compétitifs face à des produits concurrentiels de type livret A. En effet, les assureurs souffrent de l’inertie des rendements comptables de leurs portefeuilles obligataires et ne peuvent pas remonter rapidement les taux qu’ils servent à leurs clients sur les contrats d’assurance vie épargne individuelle. Ils disposent aujourd’hui dans leur portefeuille d’une grande partie d’obligations à rendements bas du fait du niveau des taux au cours des dix dernières années.
Le taux servi par les assureurs vie sur le fonds euros en 2022 a été de 1 ,91% en moyenne (avant prélèvements sociaux) d’après l’ACPR face au taux du livret A qui s’est élevé à 1,4% en moyenne sur la même période. Au 1er août 2022, le taux du livret A s’élève à 2% et passe à 3% au 1er février 2023. Sur l’exercice 2022, les assureurs ont dû puiser dans leurs réserves (provisions pour participation aux bénéfices par exemple) afin de servir un taux concurrentiel et attractif, et limiter la décollecte face aux livrets réglementaires.
Les taux minimum annuels garantis pour faire face à la décollecte
Dans ce contexte de hausse des taux, différents leviers sont utilisés pour renforcer le taux servi et réduire le risque de décollecte, cela inclut des choix d’allocations d’actifs plus agressifs, et des propositions de garanties plus attractives.
Un des leviers de marketing utilisé par les assureurs vie épargne pour encourager les nouvelles souscriptions et versements libres sur les fonds en euros, est le taux minimum annuel garanti (TMAG).
La plupart des TMAG proposés sur le marché sont présentés sous forme de bonus. Ces bonus de rendement sur les nouveaux versements (nouvelles souscriptions, versements libres) sur les fonds en euros s’accompagnent le plus souvent d’une contrainte de montant minimum à verser, sur une période définie et parfois d’un pourcentage minimum à affecter sur les supports en unités de compte (UC).
Sur la majorité des offres proposées sur le marché, on constate des bonus additionnels entre +1% et +1,75% nets de frais de gestion.
Le taux minimum annuel garanti (TMAG) correspond à un taux garanti sur une période courte au plus égale à deux ans. Il permet à l’assureur de proposer des taux plus attractifs sur une durée courte. Il est également moins risqué que les taux techniques ou taux minimums garantis (TMG) pour l’assureur, du fait qu’il n’engage pas sur toute la durée du contrat (ou sur une période longue de plusieurs années).
TMAG: rappels autour de la réglementation
Comme pour les TMG, les TMAG proposés par les assureurs doivent respecter des contraintes réglementaires. Ces contraintes sont définies aux articles A.132-2 et A.132-3 du Code des Assurances.
L’article A.132-2 donne la possibilité aux assureurs de garantir un montant total d’intérêts techniques et de participations aux bénéfices tant que la somme de ces intérêts techniques et participations aux bénéfices, rapportée à la provision mathématique, est supérieure aux taux minimums garantis.
L’article A.132-3 donne les contraintes liées à cette garantie :
- Les taux garantis en A.132-2 sont exprimés sur une base annuelle et sont fixés sur une durée continue d’au moins 6 mois au plus égale à la période séparant la date d’effet de la garantie de la fin de l’exercice suivant.
- Le montant de participation aux bénéfices garanti (hors intérêts techniques) au titre de l’article A.132-2 ne doit pas dépasser 80% du rendement moyen des deux derniers exercices, appliqué aux provisions mathématiques de l’exercice précédent, moins les intérêts techniques attribués lors de l’exercice précédent.
- TMAG < Min(Max(120%*75% TME 6 mois; 110% moyenne taux servis (N/N-1)) ; 150%*75%* TME 6 mois)
A noter que les contraintes liées au taux minimum garantis sont décrites dans des articles séparés (A132-1 et A132-1-1) du Code des Assurances.
Incertitude persistante en 2023
Courant 2023, la hausse des taux continue, la moyenne sur 6 mois des TMEs est passée de 2,31% au 31 décembre 2022 à 2,99% au 31 juillet 2023. L’inflation ralentit, elle s’établit à 4,3% sur un an en juillet 2023 selon l’INSEE, contre 4,5% en juin et 5,1% en mai.
L’augmentation des prix de l’alimentation sur un an reste élevée même si elle ralentit (12,6% sur un an en juillet 2023, après 13,7% en juin). Les prix de l’énergie reculent de 3,7% sur un an en juillet 2023.
Dans cet environnement incertain, on s’attend à une accélération d’offres de bonus sur le marché du côté des assureurs et plus généralement à une innovation plus importante sur les produits d’assurance vie épargne pour fidéliser les clients du portefeuille et limiter le risque de décollecte. Cette innovation doit néanmoins respecter le cadre réglementaire.