Conseil N°1 : plusieurs niveaux de lectures – Conseil N°2 : calendrier d’élaboration – Conseil N°3 : recommandations
Conseil N°1 : Proposer plusieurs niveaux de lectures
Le rapport de la fonction actuarielle est destiné à des lecteurs aux questions et aux objectifs différents. Prévoir ces différents besoins permet de répondre de manière plus ciblée aux attentes de chacun et d’apporter un regard critique et constructif à chacun des publics concernés.
#1 – Un volet à destination des instances dirigeantes
Destinée à la Direction Générale et au Conseil d’Administration, la synthèse comprend les faits marquants de l’année, les conclusions et avis de la fonction actuarielle, ses analyses clés et ses recommandations les plus importantes. Cette partie doit permettre une prise de hauteur sur les enjeux actuariels de l’exercice.
#2 – Un volet à destination des directions métiers
Adressée aux directions métiers, le corps du rapport représente un deuxième niveau de lecture. A la différence d’une note technique, il doit présenter en synthèse l’état des lieux des travaux menés par les équipes métiers (ex. hypothèses, méthodologies et résultats) et se concentrer sur l’analyse, la formulation d’une opinion incluant des recommandations.
- Concernant les provisions techniques, l’enjeu est de se prononcer sur leur caractère adéquat en apportant un avis sur la qualité des données, l’adéquation des hypothèses et des modèles / méthodologies retenues.
- La partie relative à la souscription formule un avis sur la politique de souscription, la maîtrise de l’antisélection et l’équilibre technique du portefeuille. Elle prend position également en cas de lancement de nouveaux produits, de modification substantielle d’un produit existant ou encore sur la pertinence des revalorisations tarifaires.
- La partie relative à la réassurance formule un avis sur la politique de réassurance et l’adéquation des mesures prises : la fonction actuarielle doit pouvoir se prononcer sur le caractère adéquat des choix de programme et des couvertures associées, en s’appuyant notamment sur des études d’efficacité en scénario central et dans des scénarios extrêmes. La qualité de crédit des réassureurs est également abordée.
- La partie relative à la contribution à la gestion des risques détaille enfin la contribution de la FA à la mise en œuvre du système de gestion des risques de la compagnie (ex. revue des SCR et de l’ORSA, coordination des dossiers de modélisation).
#3 Un volet plus opérationnel
Un troisième niveau de lecture avec des annexes présentant des analyses supplémentaires et opérationnelles peut également être proposé (ex. hypothèses et résultats d’un recalcul indépendant de provisions).
La réussite du rapport passe par la mise en place d’une relation de confiance et d’une communication adaptée avec les directions techniques et actuariat réalisant les travaux de production et avec la Direction Générale.
Le rapport ne doit pas être une simple note technique. Il doit apporter des analyses, formuler un regard critique et constructif sur les travaux menés par les équipes métier. C’est en identifiant les forces et faiblesses et en formulant des recommandations concrètes qu’il sera vraiment utile.
Conseil N°2 : Etablir un calendrier d’élaboration qui s’intègre au cycle d’activité des métiers
Le cycle d’activité de la fonction actuarielle doit être établi en coordination avec les temps forts du métier et de la prise de décision. En intervenant au bon moment pour les différentes revues, la fonction actuarielle aura un impact plus fort.
#1 – Identifier des axes d’études et d’analyses approfondies
Au-delà de la revue d’ensemble des différents sujets rencontrés au cours de l’exercice, nous préconisons d’identifier chaque année des axes d’études qui seront vus en profondeur selon leur nouveauté (ex. refonte de la structure tarifaire d’un produit, changement de modèle d’évaluation impactant les provisions techniques, modification de la structure de réassurance pour une meilleure adéquation du profil de risque), ou leur enjeu (ex. revue approfondie de la qualité de données, mise en place d’indicateurs nouveaux accompagnant l’avis sur la rentabilité).
#2 – Elaborer des avis actuariels au fil de l’activité, intégrés dans le cycle décisionnel
Pour bien fonctionner et lisser son activité mais aussi intervenir au bon moment dans le cadre du processus décisionnel (ex. avis actuariel formulé dans le cadre du lancement d’un nouveau produit nécessitant la validation du comité produit), la fonction actuarielle doit se greffer dans le cycle d’activité des métiers. Elle peut ainsi réaliser des travaux tout au long de l’année en participant aux différents comités et en émettant des avis sur les changements relatifs à son domaine de responsabilité (ex. avis en cas de changement d’hypothèse impactant le niveau des provisions techniques, avis en cas de lancement d’un nouveau produit).
La fonction actuarielle se positionne alors comme ressource pour accompagner les processus de décisions et apporter, au moment des prises de décisions, les éclairages nécessaires à la Direction Générale et aux comités dédiés.
#3 – Planifier au plus tôt dans l’année la présentation du rapport, avec possibilité de raisonner en plusieurs volets
De manière idéale, le rapport actuariel au titre de l’exercice N-1 est émis en début d’année N et s’appuie sur l’agrégation des travaux de second regard menés en année N-1 en prenant de la hauteur pour formuler des opinions globales et complètes. Ce fonctionnement permet d’intervenir dans le cadre des processus de décisions et de susciter l’intérêt dans le cadre d’une présentation du rapport en début d’année N. Un rapport présenté en mars N pour évoquer les enjeux de l’année N-1 aura plus d’impact qu’un rapport présenté en novembre N pour évoquer ces mêmes enjeux.
En fonction des organisations et des moyens accordés à la fonction, ce type de fonctionnement cible peut s’avérer complexe et la construction d’un rapport unique présenté en début d’année N questionnée.
Une présentation en plusieurs volets est alors possible :
- le chapitre sur les provisions techniques pourrait par exemple être présenté au conseil d’administration en début d’année N suite à la clôture des comptes,
- le chapitre sur la souscription en milieu d’année N (en rappelant bien qu’il concerne l’année N-1)
- le chapitre sur la réassurance en fin d’année N (tout en notant qu’elle concerne également l’année N-1).
Conseil N°3 – mettre en place un système de recommandations efficace
Cette bonne pratique permet au rapport de la fonction actuarielle d’être un réel appui à l’amélioration du pilotage technique pour l’entreprise. Elle repose sur plusieurs éléments :
- Formuler des recommandations qui s’appuient sur le second regard et les analyses menées.
- Mesurer l’impact qualitatif et quantitatif des recommandations avec des tests et des études de sensibilités appuyant la question de l’enjeu.
- Hiérarchiser les recommandations selon les enjeux.
- Co-construire et partager le plan d’actions avec les équipes métiers.
- Procéder à un suivi régulier de la mise en œuvre des recommandations.
En appuyant son rapport annuel sur des études ciblées, en coordonnant les travaux avec les équipes et en établissant un dialogue constructif avec elles, la fonction actuarielle peut fournir des éléments précieux aux managers et dirigeants de l’entreprise, de nature à éclairer les prises de décisions et affiner la gestion des risques.
Ci-dessous, quelques exemples de travaux que la FA pourrait mener pour appuyer son avis et ses recommandations :
- Recalcul indépendant des provisions avec des hypothèses et choix méthodologiques indépendants (notamment en non vie) permettant de chalenger les choix des équipes métiers et d’encadrer le montant des provisions techniques en mesurant l’incertitude.
- Etude de sensibilité sur la déformation du portefeuille accompagnant l’avis sur la maitrise du risque d’antisélection.
- Test de méthodes alternatives de calibrage d’une loi de rachat.
- Analyse d’impacts associés à l’évaluation de la qualité des données.